LE CAMP DE PRISONNIERS
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![]() prisonniers revêtus des oripeaux du champ de bataille, sans liberté, sans but, sans mouvement, comme un troupeau dans les champs, sous la morsure des frimas d'avril, trempés par les pluies glacées, malades, sans soins, à l'abandon, tremblent, grelottent. Les jours passent, les nuits s'ajoutent aux nuits, interminables. Affamés, en guenilles, les gestes lents et rares, ils dépérissent, se figent, s'endorment les yeux grands ouverts vers d'autres firmaments. Un rayon de soleil arrête la marche du destin, Dieu veille sur eux, leur apporte réconfort et espoir. Un immense chant silencieux monte vers le ciel. Le jour, c'est l'illusion, la maigre pitance enfièvre les propos échangés, fantasmes de grandes ripailles si longtemps oubliées. La condition misérable revient violemment avec l'angoisse profonde. La nuit, l'ombre les absorbe, ils disparaissent couchés dans la terre l'un contre l'autre, comme autant de gisants; gémissements et râles se mélangent dans un requiem hallucinant. La Faucheuse, d'un pas feutré, reprend sa flânerie macabre et racole au hasard. L'éternité a pris place dans le camp, ils attendent le jugement dernier qui les libèrera. ![]() ![]() |
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© France TARDON/APPRILL |